Prêt usuraire pour l’achat d'une maison
Question
Sur quoi repose le Conseil Européen de la Fatwa et de la Recherche dans son avis juridique concernant l'obtention d'un prêt usuraire pour l'achat d'une maison, et quels sont les arguments principaux qui justifient cette position selon les textes du Coran et les règles établies par les jurisconsultes ?
Réponse
Le principal fondement du Conseil Européen de la Fatwa et de la Recherche dans son avis juridique concernant l'obtention d'un prêt usuraire pour l'achat d'une maison repose sur la règle (les nécessités permettent les interdits) : une règle convenue, tirée des textes du Coran à cinq endroits, dont la parole d’Allah dans la sourate des Bestiaux : {Il vous a détaillé ce qu'Il vous a interdit, sauf ce à quoi vous êtes contraints} [les Bestiaux : 119], et sa parole dans la même sourate après avoir mentionné les interdits alimentaires : {Mais quiconque y est contraint, sans abus ni transgression, ton Seigneur est certes Pardonneur et Miséricordieux} [les Bestiaux : 145]. Les jurisconsultes ont établi ici que le besoin peut être assimilé à la nécessité, qu'il soit particulier ou général.
Le besoin est ce qui, s'il n'est pas satisfait, met le musulman dans l'embarras, même s'il peut vivre, contrairement à la nécessité sans laquelle il ne peut vivre. Allah Tout-Puissant a levé l'embarras de cette communauté par les textes du Coran, comme dans sa parole dans la sourate du Pèlerinage : {Il n'a imposé aucune gêne dans la religion} [le Pèlerinage : 78], et dans la sourate de la Table Servie : {Dieu ne veut pas vous imposer une gêne} [la Table Servie : 6].
Et puisque le Conseil s'appuie sur la règle de la nécessité ou du besoin assimilé à la nécessité, il ne néglige pas l'autre règle qui la régule, à savoir que : ce qui est permis par nécessité est limité à son strict minimum, et il ne doit pas dépasser ce qui est nécessaire.
Le logement est sans aucun doute une nécessité pour l'individu et pour la famille musulmane. Allah a d'ailleurs gratifié ses serviteurs en disant : {Dieu vous a fait de vos maisons un lieu de repos} [les Abeilles : 80], et le Prophète (paix et bénédictions sur lui) a fait du logement spacieux l'un des quatre éléments du bonheur.
Un logement en location ne satisfait pas tous les besoins du musulman et ne lui procure pas de sécurité. En plus des coûts de location, il est exposé à l'expulsion de ce logement à tout moment, par exemple si sa famille s'agrandit ou s'il reçoit beaucoup d'invités. Cela est encore plus grave lorsque la personne vieillit, que ses revenus diminuent ou cessent, et qu'elle n'a aucun refuge où se retirer.
En plus de ce besoin individuel pour chaque musulman, il y a le besoin général des musulmans vivant en minorité en Europe. Ce besoin se manifeste par l'amélioration de leurs conditions de vie afin d'augmenter leur niveau dans la société, de manière à ce qu'ils soient dignes d'appartenir à la meilleure communauté jamais créée pour l'humanité, et qu'ils deviennent une image éclatante de l'Islam aux yeux des non-musulmans. Cela leur permet également de se libérer des pressions économiques pour remplir les exigences de la bonne citoyenneté envers leur religion et leur société, et de contribuer à la construction de la société en général. Cela implique que le musulman ne doit pas travailler dur toute sa vie uniquement pour payer le loyer de sa maison et les frais de subsistance, sans avoir la possibilité d'apprendre sa religion et de servir sa communauté.
Le fait de permettre ce type de contrat est renforcé par l'argument que le musulman, en recourant à ce contrat, ne consomme pas l'usure mais en est victime, alors que l'interdiction principale concerne la consommation de l'usure comme l'ont énoncé les versets du Coran, et c'est intrinsèquement interdit sans exception. Cependant, l'interdiction de donner à manger de l'usure, mentionnée dans la Sunna, vise à empêcher la consommation de l'usure, de même que l'écriture et le témoignage sur l'usure sont interdits. Ceci relève de l'interdiction des moyens et non des fins. Une des règles bien connues ici est que ce qui est interdit en soi n'est permis que par nécessité, et ce qui est interdit pour empêcher un mal est permis par besoin, et que les interdictions des moyens sont levées par un intérêt supérieur.
Les jurisconsultes ont indiqué cela en permettant l'emprunt avec usure en cas de besoin, si toutes les voies légales sont fermées.
Pour sa part, Dar al-Ifta d’Égypte adopte le même point de vue.
Et Allah sait mieux.