Contrat de vente sans livraison

Dar al-Iftaa d'Égypte

Contrat de vente sans livraison

Question

Un demandeur dit que l’association d’al-Acher men Ramadan pour l’agriculture lui a attribué en 1978 un lopin de terre agricole de 20 feddans351 et une autre superficie pour la construction dont l’étendue est plus de 728 m². En 1983, il a tout vendu pour 30 mille L.E à une dame (définie par la suite par l’acheteuse). Cette dernière, à son tour, a entièrement réglé la somme et signé le contrat en présence de son mari. Néanmoins, le texte du contrat prévoyait que l’acheteuse devait accomplir les procédures d’officialisation auprès de l’association et payer les termes à échéance exigés par cette dernière. Le demandeur a été surpris par la réclamation de l’association du reste des termes (12830. L.E) comme s’il était toujours le propriétaire ! L’association lui a donné un préavis pour payer les redevances, sinon elle annulera le contrat par la voie judiciaire. Il est à noter que l’acheteuse a disparu.

Serais-je fautif si je revends la terre en question pour payer à l’association la somme exigible, restituer à l’acheteuse l’argent qu’elle m’a payé, et récupérer les sommes déjà payées à l’association tout en gardant à côté pour le compte de l’acheteuse le trente mille L.E. qu’elle m’a donnés, plus l’intérêt ? Serait-il préférable de laisser la terre inculte à l’association et mettre fin à cette transaction sans aucune responsabilité morale de ma part d’avoir dissipé l’argent de l’acheteuse ?

Réponse

Sauvegarder les biens représente l’un des objectifs fondamentaux de la Chari’a. Allah, le Très-Haut, interdit de les dissiper ou de les consommer illégalement. Il dit :

« Ô les croyants ! Que les uns d’entre vous ne dévorent pas illégalement les biens des autres. Mais qu’il y ait du négoce (légal), entre vous, par consentement352. »

De même, le Prophète dit :

« Le bien d’un Musulman n’est permis que lorsqu’il soit donné de bon gré353. »

Et parmi les règles décisives de la Chari’a, figurent les suivantes :

« En Islam, nul préjudice n’est à causer ni à subir. »

« Le préjudice mineur pourrait être commis pour éviter un préjudice majeur. »

Le Musulman doit protéger les biens d’autrui, comme s'ils étaient ses biens propres.

Ces règles tirent leur source de la parole du Prophète :

« Aucun d’entre vous ne sera croyant que lorsqu’il aime pour son frère ce qu’il aime pour lui-même354. »

Donc, si on réalise que les biens d’autrui ne seraient protégés que par son intervention, on est dans l’obligation de remplir ce devoir autant qu’on peut. A cet effet, Allah dit :

« Allah   n’impose   à   aucune   âme   une   charge   supérieure   à   sa capacité355. »

Alors, si le vendeur (l'acheteur auprès de l'association) n’arrive pas à trouver l’acheteuse, qu’il règle à l’association les sommes exigibles en vendant une partie des terrains dont le prix pourrait couvrir les échéances à acquitter. Puis, il conclut le contrat au nom de l’acheteuse en sa qualité de propriétaire des terrains, et ce, au cas où on trouve facilement un acheteur pour cette partie. Car la nécessité doit être estimée à sa propre mesure. Allah dit :

« Il n’y a de péché sur celui qui est contraint sans toutefois abuser ni transgresser, car Allah est Pardonneur et Miséricordieux.356 »

 

352- Coran , an-Nissa. V. 29.

353- Rapporté par ad-Daraqotni.

354 - Rapporté par al-Boukhari.

355 Coran , al-Baqara. V. 286.

356 Coran , al-Baqara.V. 173.

« Si quelqu’un est contraint par la faim, sans inclination vers le péché, sera absous, car Dieu est Clément et Miséricordieux…357 »

Par contre, si le partage de la terre s’avère impossible, donc le vendeur (l'acheteur auprès de l'association) n’a qu’à la vendre en entier, pour qu’il puisse rembourser à l’association les termes restants, récupère ce qu’il a payé et enfin légalise la propriété de l’acheteuse, tout en gardant le reste de la somme pour elle, dans l’attente de son apparition.

D’une autre part, le vendeur (l'acheteur auprès de l'association) n’a pas le droit de récupérer la terre sans l’approbation de l’acheteuse, car elle a acheté la terre et s’en est rendue effectivement maîtresse, sauf qu’elle, tout simplement, n’a pas cherché à légaliser cette transaction. Pourtant, cela n’empêche pas que cette possession soit religieusement reconnue. Le fait que le vendeur a reconnu l’achat de la terre par elle, cela ne lui permet pas de considérer le prix de la terre et l’intérêt comme une dette à acquitter au profit de la propriétaire. En effet, la terre appartient à celui qui l’a achetée, même si cette vente n’est pas confirmée par la signature du contrat avec l’association. Car, les contrats sont, en principe, verbaux alors que la confirmation de possession par la signature des documents, est le seul moyen de protéger les droits contre la perte.

Et Allah Seul le sait par excellence.

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